Maud Boulet

Maud Boulet étudie en Master 2 d’Arts Plastiques à Rennes. Elle vient, parmi de jeunes artistes, d’être primée par un concours  « Les Artistes de demain » organisé par la Galerie Double S, associée  au Festival des Arts Foreztiers .

Les dessins de Maud Boulet seront apportés et présentés au Festival des Arts Foreztiers par la Galerie Double S. Maud Boulet a crée pour le Festival  des Arts ForeZtiers un arbre  d’encre sur carte marine  qu’elle a intitulée ARBRE-MER

L’arbre-Mer, encres, stylo à bille et crayon sur carte maritime, 2015, 76,6 x 71 cm. Pour le festival des Arts ForeZtiers, « L’arbre du milieu du monde »

Après avoir longuement travaillé sur le rapport tactile/optique qui pouvait résulter de mes dessins, j’ai eu la surprise (heureuse) de constater que je ne m’étais pas vraiment intéressée aux formes concrètes que je pouvais développer. J’ai fait ce constat lors de l’exposition à la Galerie Double S et, généralement, en présentant mon travail dans un contexte concret. À plusieurs reprises on m’a demandé quelles étaient ses formes, qu’est ce que cela représentait. J’ai donc pu me rendre compte que je ne pouvais pas vraiment répondre à ces questions. Plus étonnant encore, c’est au travers du regard des autres que j’ai pu comprendre à quoi mon travail faisait formellement référence.


En effet, si ses formes sont issues de ma sensibilité tactile et que je cherche à évoquer des matières, des textures, je ne peux pas nier que leur forme finale puisse être évocatrice d’un objet. Si le travail de la matière par la ligne constitue un élément majeur de mon travail, il n’en ai cependant pas l’image unique. Le dessin illustre, d’une certaine façon, l’interprétation tactile que je peux faire des objets du réel. L’écorce, par exemple, sa dureté, sa rugosité et la surface complexe qu’elle occasionne n’est pas traitée que pour elle-même dans le dessin. Elle s’inscrit dans une forme, dans un enchevêtrement de différentes matières et de plusieurs éléments communs. Leur rapport est, certes la qualité haptique dont ils sont porteur, mais leur matérialité est défini aussi par l’objet dont elle est issu. Ainsi, je ne peux ignorer certain mot. Comment puis-je nommer ce que je représente dans le dessin ?


C’est en voyant que Sylvie Dallet avait publié un post sur le site du festival des Arts ForeZtiers à propos d’un de mes dessins, que je me suis vraiment interrogée. « Réseaux racinaires » ces mots ont sonné pour moi comme une évidence. Beaucoup de mes dessins forment, finalement, des réseaux de racines, de lianes ; ou peuvent avoir la mollesse de certain champignons. Organique – car il y en a aussi dans mes dessins – et végétal, sont les deux mots qui peuvent qualifier ce qui m’inspire. Le végétal, puisque c’est cela qui m’occupe actuellement, renferme une multitude de formes et de matières qui peuvent être exploitées pour créer de nouvelles formes. Si je lève les yeux sur l’étagère qui surplombe mon bureau, je vois des morceaux d’écorce disposés les uns à côté des autres, et une coupe de tronc noueux. Si jusqu’ici je m’étais intéressé à leurs qualités tactiles, je vois maintenant ce qu’ils sont : des morceaux d’arbre. Ces matières sont aussi un objet de la nature, avant d’être un échantillon de matière.

Paul Klee a écrit : « le dialogue avec la nature reste pour l’artiste une condition sine qua non . » C’est donc en regardant au-delà de l’haptique qu’il me semble, alors, que je tente moi aussi d’engager le dialogue avec la nature en lui empruntant ces formes. L’arbre-Mer, est un dessin sur lequel j’ai travaillé en gardant à l’esprit les inclinations du festival des Arts ForeZtiers. J’ai choisi de travailler sur une carte maritime, que j’ai trouvé au hasard dans un dépôt-vente.

Ces cartes, que j’ai récupéré, ne résultent pas d’un choix de ma part quant à leur sujet. Ici, c’est donc une carte des l’îles d’Ibiza et de Formentera. Le lieu m’importe peu, j’ai pris celle-ci parmi toutes celle dont je disposais, car elle me permettait de développer une forme issue des côtes et des courants marins qui se déploient comme le feuillage d’un arbre- monde, d’un arbre-terre. La carte sous-tend l’idée du territoire qui se couvre des végétaux essentiels au développement de l’organique. Elle est traitée par le procédé des taches dessinées. En réinterprétant le territoire des îles voisines d’Ibiza et de Formentera, j’ai cherché à créer un nouveau lieu qui existe, dès lors, autant comme un territoire que comme une forme évocatrice : celle de l’arbre.
La carte, me permettait également de faire indirectement référence à l’île légendaire Bouïane mais aussi, pourquoi pas, à Yggdrasil l’arbre qui donne accès au trois mondes de la mythologie nordique. Le nom d’Ibiza s’estompe sous les encres et le stylo sans disparaître complètement pour laisser au regardeur le soin de faire le lien entre un lieu réel et le mythe. Ainsi, on peut trouver dans l’espace inscrit sur le papier le lieu du rêve à travers le dessin. L’arbre-Mer est une manière de laisser au spectateur le choix d’y placer sa propre référence mythologique ou mystique. Entre arbre, île et mer, travailler sur une carte en transformant le territoire en objet tout en laissant sa propre vérité au lieu – en laissant délibérément le nom lisible – permet d’ouvrir le champ de l’interprétation.

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