J’ai toujours aimé dessiner…
Je suis née en Algérie au printemps 1961. Puis je suis venue en Auvergne auprès de ma famille maternelle, à Clermont-Ferrand, au pied de la chaîne des puys, ce pays où l’on peut voir des lacs ronds comme l’œil enfermer dans leurs eaux froides une légende endormie, venue du « Trésor des contes » d’Henri Pourrat.
1981 : je quitte Clermont-Ferrand pour faire mes études à Paris ; une prépa, puis le concours des Arts Déco. J’y apprends un métier, un savoir-faire : la communication par l’image, l’art délicat de la typographie et je me découvre un goût vif pour cette machine qui vient tout juste d’arriver sur nos bureaux : l’ordinateur personnel. 25 ans de vie parisienne, de multiples réalisations dans le graphisme culturel ou d’entreprise suivi d’un gros ras-le-bol de la ville : en 2007 je m’installe à Chanteuges, retrouver dans la vallée de l’Allier cette nature qui m’avait tant manqué. J’ouvre un blog pour dire les mots qu’elle m’inspire, montrer ces dessins que je fais au soleil retrouvé.
Voici ce que C. David écrivait alors dans le journal local : « Un jour de 2007, Véronique Béné s’installe dans la vallée du Haut Allier, sur les hauteurs de Chanteuges, à deux pas de l’abbaye. De ce promontoire de basalte, premières loges rêvées pour admirer la nature et ses métamorphoses, elle renoue avec le silence et une sorte de monde enfoui. Elle se souvient, « Tant d’émotions naissaient en moi pour ce territoire et ses phénomènes, ses crues, ses crépuscules, ses animaux… que, petit à petit, tout un imaginaire est réapparu, celui des contes de mon enfance, des légendes : de vieilles images archétypales qui traversent l’inconscient. Ces dernières refaisaient surface comme si elles avaient toujours été là, au creux de cette vallée ».
Fragments d’une mythologie inachevée
Et voici à présent ce que je sais : certaines nuits très étoilées, le souvenir des grands mythes reflue sur les rives de l’Allier, comme une passerelle jetée sur l’abîme du temps. Des épousailles furtives de l’antique géologie et de la légende nait cette ponctuation de l’espace qu’est le lieu, l’endroit où cela a eu lieu, le lieu où s’est manifesté la présence (puis le monde reprend sa ronde, qu’il avait suspendu un instant pour cette épiphanie). Moi je reste là, tapie comme une chasseresse, attentive au palimpseste mouvant des paysages et des saisons, guettant le retour de l’apparition, la traquant dans mes carnets de dessin, la laissant éclore dans mes yeux vagues, convoquant dans l’atelier des rencontres végétales et animales qui portent leur regard au-delà de la parole, dans des langages muets où le dialogue se fait par la seule étrangeté de la présence.