Le PREMIER ARBRE (poème de Jules Supervielle – Montevideo, Uruguay, 1884 – Paris 1960)

C’était lors de mon premier arbre,
J’avais beau le sentir en moi
Il me surprit par tant de branches,
Il était arbre mille fois.
Moi qui suis tout ce que je forme
Je ne me savais pas feuillu,
Voilà que je donnais de l’ombre
Et j’avais des oiseaux dessus.
Je cachais ma sève divine
Dans ce fût qui montant au ciel
Mais j’étais pris par la racine
Comme à un piège naturel.
C’était lors de mon premier arbre,
L’homme s’assit sous le feuillage
Si tendre d’être si nouveau.
Etait-ce un chêne ou bien un orme
C’est loin et je ne sais pas trop
Mais je sais bien qu’il plut à l’homme
Qui s’endormit les yeux en joie
Pour y rêver d’un petit bois.
Alors au sortir de son somme
D’un coup je fis une forêt
De grands arbres nés centenaires
Et trois cents cerfs la parcouraient
Avec leurs biches déjà mères.
Ils croyaient depuis très longtemps
L’habiter et la reconnaître
Les six-cors et leurs bramements
Non loin de faons encore à naître.
Ils avaient, à peine jaillis,
Plus qu’il ne fallait d’espérance
Ils étaient lourds de souvenirs
Qui dans les miens prenaient naissance.
D’un coup je fis chênes, sapins,
Beaucoup d’écureuils pour les cimes,
L’enfant qui cherche son chemin
Et le bûcheron qui l’indique,
Je cachai de mon mieux le ciel
Pour ses distances malaisées
Mais je le redonnai pour tel
Dans les oiseaux et la rosée. »

TROGNES et ENTES

Peux t’on s’interroger sur le degré de liberté d’une nation en contemplant ses arbres ? Y a t’il une relation entre la taille des arbres domestiques et la préservation des arbres fauves, ceux qui croissent dans les forêts sauvages ? Doit-on mesurer la taille de la végétation à l’exercice de la citoyenneté ?

Je me suis posée cette question à plusieurs reprises, après qu’une amie m’aie fait remarquer la tradition française de taille des arbres ras, ne laissant que des moignons, les trognes, ou des créations mimétiques, dont l’arrondi figure des animaux domestiques, canards, lapins, boules topiaires. Ma réflexion se poursuit, hantée par cette manie française qui arrache les arbres plantés par le passé pour protéger le passant de l’ombre. Désormais, ces arbres vénérables, platanes pour la plupart, sont considérés comme de dangereux prédateurs : leurs racines culbutent les passants fragiles tandis que leurs troncs stoppent définitivement les voitures dont les freins lâchent.

L’enfant ne peut plus jouer, ni l’adulte se rafraichir. La majesté des platanes se raréfie sur les rues anciennes. À leur place, quelques jeunes pousses tutorés rappellent que la nature a besoin de la paternité humaine…

Un récent voyage en Angleterre, dans le Wiltshire, offre matière a réflexion entre Histoire et environnement. La comparaison entre la France et l’Angleterre, pays proches, mais séparés d’un bras, apporte ses réponses. En Angleterre la Forest se tapisse de grands arbres aux longues branches, dont les ramures imposantes bordent les routes les plus fréquentées. Je savais que le modèle du Jardin Anglais reprenait de la Nature son parcours sinueux. Ce que j’ignorais, et cela saute littéralement aux yeux, c’est la présence dans la forêt communale dans une sauvagerie qui suggère toutes les fantasmagories. Point d’orgue : l’arbre d’Oxford qui, de la cour de l’Université, a inspiré la figure des Entes, ces arbres fées de Tolkien.

Trognes nourricières, topiaires velus ou arbres pensifs, échevelés et magnifiques ? La pensée anglaise laisse coexister chacun dans sa démesure singulière, dans une mosaïque de temps et de terroirs. La pensée française élague en son jardin, gardant dans les cercles des musées quelques grands témoins protégés. L’analogue démocratique se laisse malicieusement deviner.

FOUGÈRES

 

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La nature pour les artistes est un sujet de contemplation et l’occasion d’élaborer une pensée personnelle. Mais aujourd’hui, il faut me semble-t-il, y ajouter une réflexion sur les stratégies de résistance et de guérison.

Que pouvons-nous faire devant la perte du sens et les ravages de la financiarisation ?
Devant le danger, la nature crée ses solutions de survie.
La création artistique permet d’expérimenter certaines procédures qu’emploie la nature pour se régénérer. Elle élabore petit à petit une conscience qui ne fait pas que réfléchir la nature, elle la pénètre de l’intérieur pour la comprendre et s’en faire une force alliée.
Ma série des Fougères est une tentative de cet acabit. Cette série de fusains et de peintures est une méditation sur la création inaugurée il y a trente ans, qui continue à interroger la formation du visible et le renforcement du vivant. Cela se traduit par une revitalisation de la matière, une régénération de la forme et de l’espace.31bis-Fusain-33x41-  Branche-de-hêtre-au-soleil-titrée-

Quand le chaos hypnotise les sens et immobilise l’esprit, rester simple. Malgré la complexité, attendre de percevoir la géométrie des choses. À travers les enchevêtrements, retrouver les traces de flux. Court-circuiter l’incompréhensible en s’installant dans le non savoir. Vivre le geste pictural, sentir la plante. Être, comprendre plutôt que représenter.
La vitalité émerge alors par la touche pulsive, le sens de la forme. La matière respire dans l’interpénétration des matériaux hétérogènes. Au hasard des rencontres, la couleur et la matière ordonnent le passage mystérieux du visible. Des multiples couches de ce chaos sensible émerge le trajet lisible et puissant de la sève.
Pour appréhender le désordre des Fougères j’utilise les fractales de Mandelbrot. La fractale est une forme complexe, qui se déploie à l’identique du tout petit au plus grand. Son arborescence passe avec aisance d’une échelle à l’autre, de la terminaison végétale à la feuille, de la branche à la plante sans autre transformation que le développement infini de l’arborescence.
Ce développement majestueux n’est-il pas la source d’une régénération infinie ?

Martine Salzmann
Paris février 2015

« ARBOREUSEMENT »

ARBOREUSEMENT est un « concept » lié à ma pratique d’enseignement autour d’une Performance ou Danse des Arbres. Dans la Danse ou Bio-Danse des Arbres les participants des ateliers des arbres apprennent les sons liés aux différents arbres; une sorte de langage des arbres. Ce langage est relié aux gestes et mouvements corporels en correspondance avec chaque arbre.

Ainsi une sorte de Danse d’Ancrage à la fois un Yoga Dynamique des Arbres et/ou un Taï-Chi des Arbres, dont les mouvements sont toniques et d’autres plus en lenteur et en profondeur. Le SHINAN est ainsi mis en danse comme une forme pratique de développer une « conscience verte » entre les humains et les arbres et également de pratiquer une forme thérapeutique envers le développement durable et personnel. ARBOReusement est aussi une forme d’ARBOR-ESSENCE: gestes et mouvements entre les pieds-orteils-chevilles et jambes (racines) en passant par le tronc (région pelvienne) jusqu’au bras-poitrine-dos-coup et tête (la cime des arbres ou la canopée).

Catitu Tayassu

Les arbres et les paysages remarquables

Les arbres et les paysages remarquables

En mars 2018, Aude Crozet nous adresse cette photographie  prise en contre plongée de deux chênes jumeaux, enlacés dans en forêt de Boulogne (Loir-et-Cher). « Ils ont 330 ans et mesurent environ 32 m de haut et 110 cm de diamètre chacun. Une apparition touchante et impressionnante dans cette forêt où ses congénères ne dépassent pas les 130 ans…  »

Sur les chemins d’Aurouze (©Sylvie Dallet)
Photo prise dans le bois de Vincennes (© 2015 Ivan Magrin-Chagnolleau)
Photo prise à Chavaniac-Lafayette (©2015 Ivan Magrin-Chagnolleau)
Photo prise à Chavaniac-Lafayette (©2015 Ivan Magrin-Chagnolleau)
Un saule du Bois de Vincennes, à la belle présence (photo Ig'Or Galan)
En Algérie, après la déforestation, on plante des arbres étranges, faits de canettes de bière ou de branches mortes colorées (@Madjiddjenane)
Un séquoia (parc de Yosemite-Photo Laurence Honnorat)
Le robinier de ma cour en fleurs, son parfum emplissait l'air
Pilier sculpté en Estonie (©Sylvie.Dallet)
Sylvie et l'arbre aux coeurs (photo Anne Monsonis, août 2015)
L'érable de mon jardin (photo Douglas Attwood, Southampton)
 

Cette rubrique met en évidence la beauté des arbres à travers les photographies qui leur sont consacrées. Cette page accueille  du monde entier les photographies personnelles qui nous sont envoyées : arbres familiers, majestueux, sensibles, isolés, singuliers, spirituels, étranges, amicaux…

Les photographies doivent être originales et elles nous sont envoyées par leurs auteurs : elles viennent  de Frances Attwood, Vero Bene, Sylvie Dallet, Albert David, Laurence Honnorat, Elisabeth Launay-Dolet, Yannick Lebtahi, Weixuan Li, Ivan Magrin-Chagnolleau, Michel Monier, Eddy Saint-Martin, Félix Monsonis, Gilbert Schoon,  et bientôt de vous….

Retrouvez nos divers articles sur le thème « Arbres et paysages » ! 

L'Arbre Cercle/Cézallier (photo Vero béné)
La porte des arbres, Taiwan, juillet 2010 (photo Weixuan Li)
Le baobab qui nous attend (photo Eddy Saint-Martin, 2014, Sénégal)
Montreuil, un matin dhiver
L'arbre du saut du saumon (Romsey, photo France Attwood, Angleterre)
À Rio de Janeiro, l'arbre à la plage (Brésil, Photo Laurence Honnorat)
Un Tamaris crétois en bord d'eau (photo Monsonis)
Le cyprès de Chanteuges (photo Sylvie Dallet)
Coupe de bois (Photo-Michel Monier, Auvergne)
Frènes amoureux/vallée de la Desges (photo Véro béné)
L'arbre fée d'Oxfort
Cet arbre a été planté par Victor Hugo en son jardin pour symboliser l'espoir en les États-Unis d'Europe. Curieusement, il est plein de neouds et de cavités, mais il résiste.
L'arbre des États-Unis d'Europe, planté par Victor Hugo à Guernesey (Photo Sylvie Dallet)
Pommier chamane (photo Sylvie Dallet)
Sensualité (photographie Yannick Lebtahi)
Le cerisier d'Auteuil (Elisabeth Launay-Dolet)
Pas de promesse des fleurs : le cerisier sans fruits (photo Gilbert Schoon)
Le "chêne des sorcières" de Saint-Avold (photo Album Eaux & Forêts, droits réservés)
Drapeaux de prières et arbres sacrés (Gansu, juillet 2010-Chine, photo Weixuan Li)
Désert États-Unis (photo Laurence Honnorat)
L'Arbre qui salue les passants (Sénégal, photo Eddy Saint-Martin)
L'arbre du sentier/Forêt de Fontainebleau (photo Sylvie Dallet)
L'arbre corse, chaleur (photographie Albert David)

“L’Arbre du Milieu du Monde”, quatrième et cinquième éditions des Arts ForeZtiers (2015 et 2016)

 Les images de 2015…

« L’Arbre du milieu du Monde«  est le thème de la manifestation  biennale de 2015.Cet Arbre sollicite des symboles  profonds, dont toutes les civilisations portent les traces mythiques : arbres de vie, de connaissances, mémoires vivante des siècles, capillarités et racines  de nos imaginaires.

Artistes et écrivains « en herbes et en arbres » sont invités à participer de ce blog poétique qui développe ses racines et ses branches jusqu’à la manifestation des Arts ForeZtiers d’août 2015, puis sur le Festival nouveau qui se situe en juillet 2016.

En effet, à la demande des partenaires,  le Festival va redéployer ses racines sur deux thèmes  en juillet 2016: L’Arbre du Milieu du Monde  (thème reconduit, exploré et abordé de nouveau) et Botaniques célestes.  Le Festival se déroulera à Chavaniac Lafayette du 8 au 11 juillet 2016. Continuer la lecture de “L’Arbre du Milieu du Monde”, quatrième et cinquième éditions des Arts ForeZtiers (2015 et 2016)